La cliente de Pierre Assouline
Ma rencontre avec ce roman :
Le hasard, il y a des années: je farfouille dans une librairie. Un titre, une photo, un résumé. Bonne pioche !
L'histoire ou ce que je veux en dire :
Lors de recherches sur la vie d’un écrivain, un biographe obtient exceptionnellement un accès aux archives de la seconde
guerre mondiale et notamment à des milliers de lettres de dénonciation rédigées durant cette sombre période. Doté d’une personnalité obsessionnelle et d’un total manque de distanciation, il n’est
absolument pas armé pour faire face à ce qu’il va découvrir. L’étude de ces courriers, le plongent alors dans toute la noirceur et l’abjection de l’âme humaine et vont rapidement le
conduire dans un état d’angoisse fiévreuse, de nausées, le tourmentant la nuit comme le jour.
Mais le pire est qu’il va découvrir parmi ces milliers de lettres, celle qui a valu l’arrestation et la déportation de toute
une famille dont l’unique rescapé est un ami. Il s’appelle Henri Fechner, il est fourreur à Paris. Et l’auteure de la lettre est une fleuriste dont la boutique se situe depuis 50 ans en face de
celle de sa victime. Elle est aussi toujours une bonne cliente de Monsieur Fechner.
Notre écrivain va alors tout tenter pour se confronter à la dénonciatrice, obtenir des aveux, des explications, la mettre
face à ses responsabilités même (et surtout) après que les Fechner, mis au courant, ai refusés catégoriquement de rouvrir cette partie de leur passé.
Sa quête obsessionnelle va se heurter aux refus d’entendre, de retourner un passé peu glorieux, au silence. Elle va
aussi conduire le narrateur lui-même à des comportements limites, frisant la folie.
L'auteur ou ce que j'en sais :
J’en sais peu : Biographe, écrivain né à Casablanca en 1947
Je n’ai lu d’autre de lui que « les invités »
Mon avis sur la question :
C’était ma deuxième lecture de ce roman et je l’ai trouvé tout aussi fort et passionnant que la première fois, il y a
des années.
Il m’a été difficile d’écrire cet article tant il y a à dire sur les sujets que dégagent ce roman, tant les questions qu’il
pose sont riches, délicates et nombreuses :
Qu’aurions nous fait, nous en 1943, la faim et la peur au ventre ? Aurions nous été des héros, jusqu’ou aurions nous pu aller
pour sauver des membres de notre famille, aurions nous été capable de sacrifices ?
Nous apprenons que parfois la réalité est parfois plus complexe qu’il n’y parait. Nous apprenons aussi, au travers de la
progression du narrateur, que la frontière est facile à passer entre le héro et le bourreau, même sous le prétexte de vouloir faire le bien.
Ce roman est, selon mon avis, très réussit, le sujet bien qu’étant malaisé est traité avec beaucoup de finesse et sans parti
pris ; la première partie notamment (découverte des lettre par le narrateur) est particulièrement brillante.
L'image qu'il me restera de ce roman
:
Le narrateur poursuivant la vieille dame en larme dans un bus, vociférant et la traitant de dénonciatrice et de « collabo »
sous le regard désapprobateur des autres passagers.
Une phrase du roman qui donne le ton:
Le narrateur obtient un accès exceptionnel et quasiment illégal, au archives de l’occupation, normalement
inaccessibles
: “On me remettait une bombe dans une main, un détonateur dans l’autre en me faisant jurer de ne pas les mettre en rapport
»
Trois mots pour définir ce livre :
Remort, douleur, passé
Le mot de l'éditeur :
Dans ce roman, Pierre Assouline met en scène un biographe qui, en recherchant des informations sur la vie d'un écrivain, découvre par hasard des lettres de dénonciation datant de l'Occupation. Il
repère plus particulièrement celle de Mme Cécile Armand-Cavelli, une "honnête citoyenne" qui a dénoncé la famille Fechner. Et il se trouve que ces gens sont des cousins de la femme du narrateur.
Les Fechner étaient fourreurs dans le 15e arrondissement de Paris et suite à cette lettre, la police les déporte en décembre 1941. A la fin de la guerre, un membre de la famille Fechner revient
et il rouvre la boutique familiale tout en cherchant à oublier. Mais le biographe n'est pas de ces avis, il veut tout savoir, l'identité de cette femme et les raisons de sa dénonciation. Mme
Cécile Armand-Cavelli est la fleuriste dont la boutique fait face à celle de Fechner et avec qui elle entretient depuis près d'un demi-siècle des relations de bon voisinage basé sur son amnésie
volontaire et l'ignorance de son voisin. Le narrateur veut comprendre, il veut que la vérité éclate par tous les moyens et l'enquête qu'il mène est à deux doigts de le rendre fou.