Dès le commencement du roman, le ton est donné : il sera de ceux que l'on déguste, dont on pèse les mots, de ceux dont il ne faut rien rater.
Sorj Chalandon nous livre ici un roman personnel, important et d'une telle intensité qu'on se sent un peu fébrile tout le long du récit.
Personnel car c'est l'histoire authentique que Sorj Chalandon a partagé avec Denis Donaldson, terroriste Irlandais et pilier de l'IRA. C'est le regard douloureux, triste et infiniment respectueux de l'ami sur celui qui a trahi les siens.
Important car il témoigne d'une page sanglante et décisive de l'Histoire de l'Irlande, celle qui a accompagné de manière quasi-quotidienne notre enfance avec ces mots : IRA, attentats et terrorisme. Et comme pour "L'attentat" de Yasmina Khadra, il ne s'agit pas d'excuser l'inexcusable, mais de savoir et éventuellement de comprendre.
Intense parce qu'on est Irlandais le temps de 320 pages et probablement longtemps après, et puis parce qu'il y a la voix de l'enfant meurtri, du héros, du combattant, du traître qui résonne et nous bouleverse par son humanité, sa dignité, sa douleur, sa culpabilité et sa faiblesse.
La plume de Sorj Chalandon est à la hauteur de la force et de la beauté de son témoignage, il nous offre avec "Retour à Killybegs" un roman bouleversant et captivant.
Le mot de l'éditeur :
Maintenant que tout est découvert, ils vont parler à ma place. L'IRA, les Britanniques, ma famille, mes proches, des journalistes que je n'ai même jamais rencontrés. Certains oseront vous expliquer pourquoi et comment j'en suis venu à trahir.
Avec
Retour à Killybegs
, Sorj Chalandon se glisse dans la peau de Tyrone Meehan, un homme qui a trahi, dont il nous conte l’histoire et dont on entend la voix. On voit comment se déroule, sur trois générations, le fil d’une existence, en Irlande du Nord. L’enfance entre un père violent et une mère qui ploie sous le fardeau des naissances et de la mi-sère. Puis la haine des Anglais, très tôt enseignée par le père, qui, un jour, lassé de tout, disparaît. Commence alors l’engagement du jeune Tyrone Meehan dans l’IRA, jusqu’à ce que le héros qu’il était passe de l’autre côté. Est-ce ex-plicable, est-ce admissible ? Ce texte tout de dignité, de violence et de tendresse, laisse ouverte la voie de l’indulgence.