Un heureux événement d'Eliette Abécassis
Ma rencontre avec ce roman :
Une toute petite et très tropicale case-bibliothèque ornée de lambrequins, toute minuscule et mignonne défiant l'immense et
colérique puissance de l'océan indien qui lui faisait face .Une magnifique première de couverture, rien de moins que le bouversant "espoir" de G.Klimt. Bref, incontournable pour moi: folle
de Klimt, tout juste échappée du service néonatologie avec son bébé tout neuf.
L'histoire ou ce que je veux en dire
:
Barbara est une brillante jeune femme, sûre d'elle et de ses libres
choix, elle aime Nicolas et accepte de lui faire un enfant. Elle
envisage cette aventure comme une continuation à même de magnifier
leur amour mais ne semble pas entendre que cela va aussi le modifier,
à cela elle veut s'opposer, forte et féministe refusant de changer
celle qu'elle est devenue et aime être, incapable de résister à la
bourrasque émotionnelle qui la submerge.
L'auteur ou ce que j'en sais :
Eliette Abecassis est née en 1969, fille d'Armand Abécassis,professeur de philosophie et grand penseur du judaïsme et de
Janine Abecassis professeur de psychologie de l'enfant. Elle a un frère et une soeur .Elle est agrégée de philosophie enseigne un peu puis se lance dans l'écriture de romans, livres pour enfants
et scénarios .Elle vit à Paris et est mère de deux enfants.
Mon avis sur la question :
J'ai aimé l'expression crue de se retour forcé à la matrice, à ce ventre manifique qui domine tout et porte avec la vie et
l'espoir, l'angoisse. L'ambiguité entre l'espoir de cette vie nouvelle et le refus violent de l'héroïne à se réapprende,différente de la femme qu'elle avait jusqu'alors su
devenir.
L'"espoir" de G.Klimt, outre la représentation très poétique de la
femme enceinte, est peuplé de têtes de mort, de masques inquiétants
figurant le vice, la pauvreté, la maladie et la mort qui menacent la
nouvelle vie, nouvelle vie de l'enfant à naitre , nouvelle vie de la
femme devenue mère...
Dans heureux évènement Barbara nous parle très sincéremment de son
désarroi et se rebelle devant cet état qu'elle refuse de voir comme
celui de la féminité accomplie.A l'époque se livre m'a fait rire et
prendre du recul ,tout au contraire de Barbara moi je m'efforçait de
devenir brusquement une triomphatrice du retour aux origines,
victorieuse héritière de cette expérience"si tragique et si divine".
L'image qu'il me restera de ce roman :
"En journée il était bondé d'enfants (ce parc) et de nounous de toutes
nationalités, africaines, sri lankaises, polonaises... Voilà, c'est
ainsi, on fait des enfants parce qu'on en a envie , et puis comme on
ne les supporte pas on les confie à des nurses Même le samedi
après-midi pour surtout les voir le moins possible et que la vie
continue..(...)Peut-être fallait-il croître avant avant de se
multiplier(...)C'est en ayant un enfant qu'on grandit. Un enjeu pour
toute la société, pas seulement pour les individus. Car cette société
ne nous permet pas d'accueillir les enfants, même si elle fait
semblant de l'encourager.
Dans notre pays, il est bien plus facile d'avoir un chien qu'un
enfant. Un chien ça ne détruit pas le couple, ça ne demande pas
d'épisiotomie, ça mange n'importe quoi, ça ne doit pas être allaité,
ça ne néccessite pas de congé de maternité.Voilà pourquoi l'animal
domestique est en train de remplacer l'enfant dans les familles.
Une phrase du roman qui donne le ton :
Elle m'a disloquée, et elle m'a enfantée. J'étais sa fille. J'étais sa
créature, désormais.
Trois mots pour définir ce livre :
Intense
Origine
Impudique.
Le mot de l'éditeur :
" Désormais ma vie ne m'appartenait plus. Je n'étais plus qu'un creux, un vide, un néant. Désormais, j'étais mère. "
Violent, sincère, impudique, le nouveau roman d'Eliette Abécassis brise les tabous sur la maternité, cet " heureux événement " qui n'est peut-être qu'une idéologie fabriquée de toutes pièces. Après "Mon père" et "Clandestin", la romancière affirme un ton toujours plus personnel, où la fiction se mêle à une analyse subversive de la société.